mardi 1 décembre 2009

ansabere - couloir garrote




Toujours quelques photos d'une belle goulotte dans un endroit que j'aime particulièrement : Ansabere


J'avais à l'époque fait le récit de l'ascension pour Le site consacré aux aiguilles d'ansabère.


Le récit :

Tout commence, comme souvent avant le week-end, au téléphone avec Mickael :

-« Tu as vu, ils ont ouvert une nouvelle voie qui parait superbe à Gavarnie : A las estrellas »

-« ouaih, j’ai vu mais on y était encore hier (crac 40) et j’ai encore mal aux reins de l’artif. Par contre, j’ai eu Arnaud au téléphone. Il a gravi le couloir garroté à Ansabère aujourd’hui. C’était tout bon, la trace est faite, le paysage est superbe et un peu de mixte nous changerait de la glace. En plus, on y a pris un but l’an dernier »

-« OK, à Samedi »

Samedi matin 5h, rendez vous à l’usine hydro-électrique entre la route de la vallée d’Aspe et celle du Barétous. Je suis à moitié endormi et j’ai mal à la tête ; la faute à un repas trop arrosé la veille au soir. Mickael, en avance, m’attend comme d’habitude. On file rapidement sur le parking au pied de la piste du pont lamary.

-« On prend les raquettes ? »

-« Pas la peine, Mickael, on suivra les traces d’Arnaud et de ses copains »

-« Tu vas voir, on va brasser. Moi je prends les bâtons »

Trois heures plus tard, au pied de la voie, on a bien sûr pas brassé mais Mickael est du genre obstiné.

-« Tu verras, ils ne me gêneront pas dans la voie et pour la descente, je serai content de les avoir »

J’attaque la première longueur sans laisser le choix à Mickael. Le premier ressaut me plait et le second parait sympa bien que teigneux.

-« enfin de la montagne, de la vrai. Il commence à en avoir marre de tes glaçons »

Un bon friend et j’attaque les hostilités. Une partie verticale pas si facile, un peu de neige inconsistante pour se rétablir où je ratisse la neige tel un jardinier avec mes piolets, un pas à droite pour se rétablir et je commence à regarder le second ressaut. Je regarde à gauche. Surprise, un couloir part vers la grande aiguille. Pas de doute, la voie est là. Les traces de nos prédécesseurs sont là pour le confirmer. Je franchis un deuxième ressaut protégé par une lunule autour d’un bloc coincé. Le couloir se referme. Il faut passer dans un trou. Je sors tout juste en rampant. Le couloir s’élargit, puis repart vers la droite. Un piton et une belle lunule plus loin, je fais relais à 60m sur 2 microfriends plus un coinceur en place. Mon compagnon de cordée commence à arriver. Tout d’un coup, la corde ne file plus, puis repart enfin. Mickael arrive.

-« Je suis resté coincé dans le trou. J’ai du redescendre et enlever mon sac »

-« Ah bon ?; moi j’ai pas eu de problème »

-« c’est sûr, t’as vu ton sac à dos : c’est une musette, il y a rien dedans »

Mickael repart pour la seconde longueur. Il choisit élégamment de passer par le dièdre de droite avec un mince placage suffisant pour les piolets et crampons, plutôt que de renfougner par la gauche. La pente diminue un peu mais le couloir se resserre fortement. Il faut passer sous un bloc coincé.

-« Jean Pierre, tu crois que mon sac passe »

-« sans problème »

Evidemment, trois mètres plus loin, Mickael est coincé. Il arrive à redescendre un peu, accroche son sac sur un de ces brins de cordes et repart. Il arrive à la sortie du bloc coincé et doit enlever le casque pour passer, sous mes railleries bien appuyées. Une minute plus tard, il ne rigole plus du tout :

-« Jean Pierre, mon sac est coincé à cause des bâtons télescopiques accrochés dessus . Je fais un relais intermédiaire pour que tu viennes le décoincer. »

-« je t’avais dit de pas les prendre. T’es vraiment une bourrique ! »

Une heure plus tard, après avoir décoincé le sac et être redescendu de 5m pour faire un relais plus confortable, j’assure Mickael qui arrive enfin au relais (le seul en place de la voie). Je finis donc la longueur, arrive au fameux bloc coincé en ayant pris soin d’enlever ma « musette ». Je comprends alors les déboires de mon compagnon. J’arrive à passer la tête sans enlever le casque mais je suis bloqué au niveau de la poitrine et je dois m’y reprendre à 2 fois pour passer. J’arrive au relais et lève la tête. Je vois au dessus de moi un passage de 6 ou7 mètres légèrement déversant en neige inconsistante. La partie s’annonce compliquée!

Je récupère rapidement le reste du matériel. Ces manœuvres « Mickaelesques » nous ont fait perdre un temps précieux. Je fais 2 mètres sur un placage de glace assez vertical, plante une bonne lame et regarde avec perplexité la suite du ressaut. Au dessus de moi, plus de glace mais de la neige pulvérulente. Je m’apprête à faire le jardinier avec mes piolets lorsque je vois des traces de crampons sur la dalle à droite. Je me vache au piton pour regarder de l’autre coté de l’éperon à ma droite. J’aperçois une fissure légèrement déversante avec, en haut de celle-ci, un piton avec une sangle et 2 burils. Je suis déjà au passage d’A1 de la voie que j’imaginais beaucoup plus haut. Je sors mon étrier et range consciencieusement mes pitons et attaque la fissure sans me faire de frayeur, excepté pour la dernière lame avant le premier buril que je n’arrive pas à rentrer de plus de 2 centimètres et qui sort la première fois que lui tire dessus. Mickael l’enlèvera à la main. Je ressors mes piolets et finis le ressaut par la glace. La pente se couche. Je me crois sorti lorsque j’aperçois au dessus de moi un dernier ressaut de 2m vertical avec du verglas dessus. Je mets un bon piton, plante avec des ruses de sioux mes piolets au dessus du ressaut dans la neige compacte et pose mes crampons sur le verglas avec des précautions de vitrier. Je vais poser mon piolet plus haut et je me rétablis. Cinq mètres plus loin, j’établis un bon relais sur 4 friends. Mickael arrive, sort du dernier ressaut en me disant que lorsqu’il n’y a pas de neige compacte au dessus, cela doit être une toute autre histoire. J’approuve pensivement. Le garroté fait partie de ces couloirs où de très bonnes conditions sont indispensables pour ne pas galérer.

Mickael repart déjà et me fait venir à corde tendue jusqu’à la brèche entre la grande aiguille et le pic de pétragème, en ayant surmonté un court mais vertical passage en bonne glace. Relais sur un vieux piton en place et une bonne lame. Je repars pour sortir et j’arrive au pied d’un bloc coincé sans glace. J’hésite un long moment pour savoir si je le franchis à gauche ou à droite. Je m’engage finalement sur la droite, pose une dernière fois les crampons sur des réglettes et sort dans la neige. Je redescends sur l’autre versant, fait venir Mickael en prenant soin d’avoir la corde bien tendue. Je vois sa tête sortir. Il ne nous reste plus qu’à rentrer. Mickael sort ses bâtons qui s’avèreront enfin utiles pour la descente dans la neige molle. Nous aurons mis 6h dans la voie en perdant une bonne heure dans les manœuvres de sac. Un dernier regard en descendant pour la voie sorgintxulo, prochain objectif affiché de l’été prochain dans le coin et nous nous dirigeons déjà vers la classique bière du permayou.

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