Lorsque nous arrivons à Riglos avec Michel, c'est la foule des grands jours : c'est la fête du village et il y a des cordées dans toutes les lignes classiques. Je lui propose alors timidement d'aller nous frotter à la mythique Helios au puro. Nous hésitons un moment avant de nous dégonfler bien vite : nous ne nous sentons pas encore prêts (surtout moralement).Il est vrai que le nombre de répétitions (elles peuvent se compter sur les doigts d'une seule main en plus de 30 ans) de cette ligne si évidente à une minute du parking et aux cotations, à priori, avenantes nous calme bien. L'identité de l'un des ouvreurs (Fernando Cobo, old school)achève de nous démonter le moral.
Au début des années 90, Bunny semblait regretter la transformation de l'escalade en activité sportive : "Elle y perd les notions de risque et de longueurs au profit du plaisir du geste et de la difficulté pure" (un extrait de sa bible verticualidad). Avec le temps, je me rends compte que ce que je recherche avant tout dans l'escalade et en montagne, c'est une part d'aventure (il est vrai que le fait d'avoir un niveau ridicule en escalade sportive, ça aide pas mal à ne pas tomber du coté obscur de la force). Il est fort possible qu'il en soit de même pour beaucoup de montagnards ( qui, sinon, pratiqueraient une autre activité, genre tennis ou football). Pourtant l'aventure n'est pas toujours du coté où on la cherche. Il est certain, par exemple, qu'il est beaucoup plus engagé (et dangereux) de grimper helios, en partie spitée malgré les touristes qui vous regardent depuis le bar ou le chemin et l'ambiance festive des lieux, que d'aller grimper une classique de Montrebei ou même l'arlaud souriac au vignemale, après que 15 cordées y soient passées.
Pour cette fois ci, on se défile, donc. Comme on est un peu des asociaux (enfin,... surtout moi), on décide d'aller grimper un éperon court mais très peu parcouru, l'éperon des cachorros. Michel se fait cueillir à froid dans le premier pas, bien bloc, mais les points rapprochés nous rassurent. J'attaque le second 6c confiant mais les points s'éloignent de plus en plus et les passages loin de la dernière protection se font de plus en plus obligatoires. Je finis la longueur en mode survie avec une cordée espagnole voisine qui aura pitié de moi et qui m'indique la direction à suivre pour atteindre le prochain point (en plus, j'ai failli tuer leur chien qui les attendait au pied de la voie en arrachant un gros bloc). Michel finit la voie sur un pilier en construction avec seulement 3 spits sur une bonne trentaine de mètres.
On redescend et on va grimper l'éperon Arrabal, beaucoup plus équipé, sauf qu'on se rend compte en haut qu'il fallait prendre des coinceurs pour la dernière longueur pas équipée. On sortira donc par todo tiene fin.
L'éperon des cachorros
L'éperon José Luis Arrabal
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Bien écrit Poulet, je donne mon point de vue car un blog sert aussi à exprimer ce que l’on ressent et permet de réfléchir…. par écrit sur ses motivations.
RépondreSupprimerUne voie en Montagne est en fait une rando plus ou moins verticale, qui permet de rejoindre un sommet, un col… où l’aspect technique donne au projet une autre saveur. Ce n’est pas la difficulté mais la ligne qui donne la beauté à l’itinéraire. Si l’escalade sportive développe le geste… l’évolution dans les difficultés avec le plaisir que cela procure, l’alpinisme de tout niveau offre à l’œil un panorama plus ouvert et donne à celui qui le pratique un petit air d’aventure fort sympathique. Le plus important n’est-il pas de se faire plaisir… et le niveau, on s’en fou. D’ailleurs cela m’arrange de dire cela… Je crois que maintenant dans toutes les disciplines on peut se sentir nul par rapport à un niveau. Tout à explosé et cela laisse rêveur. Les comparaisons, Poulet, ne sont pas bonnes à faire car le plaisir que l’on a dans une activité est lié à soi même et non par rapport à quelqu’un d’autre ou à telles ou telles performances.
J’arrête là car je commence à délirer … et je vais encore écrire des conneries.
Robert
Salut mon fidèle et pratiquement unique lecteur,
RépondreSupprimerIl est évident que la notion d'aventure est liée au niveau et au moral de chacun.
Par contre, pour la notion de plaisir, j'apporterais un bémol à ce que tu dis.
Quand tu es monté au gasherbrum (je ne parle volontairement pas de l'éverest ou du shishapangma, où tu as laissé quelques plumes et où tu m'as dit toi même que le jeu n'en valait pas forcément la chandelle), tu ne t'es pas forcément fait plaisir en plein effort (avec un gros sac que tu as soi-disant porté). Par contre, tu étais content après coût et tu en gardes un super souvenir. Le plaisir immédiat, ce n'est pas ce qui t'as guidé à ce moment là.
A mon niveau, quand je fais de l'escalade sportive, je me fais bien plaisir. Pourtant, ce n'est pas les souvenirs les plus forts que je garde. C'est finalement presque dans les moments où j'ai le plus galéré en montagne, où c'était vraiment l'aventure, que je garde avec plaisir dans ma petite tête. je suis maso, docteur?...
Moi, je préfère, mon poulet, quand tu ne parles pas et que tu places tes points, bien installé sur tes crochets avec une bonne protection 5 ou 6 mètres sous toi.
RépondreSupprimerL'aventure, pour moi, commence dès que je te vois.
Un ami qui ne te veut pas de bien.
Fabrice
en général, je m'arrête avant et, si jamais ça arrive, tu sais bien que je suis plutôt bavard dans ces cas là!
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